Les principales ONG russes ont dénoncé mardi une attaque de l'Etat contre l'une d'elles, le Centre d'assistance à la protection internationale (CAPI), qui défend notamment les dossiers de civils tchétchènes face à la Russie à la Cour européenne des droits de l'Homme de Strasbourg.
"Toute la communauté des défenseurs des droits de l'Homme est profondément inquiète de la tentative de détruire la société civile en Russie" au moyen de réclamations fiscales infondées visant à fermer l'organisation CAPI, a déclaré Lioudmila Alexeeva, présidente du Groupe Helsinki de Moscou, lors d'une conférence de presse avec les représentants de plus de dix ONG russes.
Le fisc russe affirme que le CAPI aurait dû payer cinq millions de roubles (près de 170.000 euros) d'arriérés d'impôts sur des subventions reçues entre 2002 et 2004 pour des programmes de formation.
Cette mesure du fisc risque de causer "la fermeture du Centre", a averti la Commission internationale des juristes (ICJ) dans un communiqué distribué lors de la conférence de presse.
La Commission ajoute qu'il s'agit "d'une application sélective de la loi fiscale à une ONG qui dévoile les violations des droits de l'Homme de la part du pouvoir" russe.
Le CAPI fournit depuis 1994 une aide juridique aux Russes souhaitant avoir recours à la Cour européenne des droits de l'Homme. Il a notamment aidé plusieurs Tchétchènes à gagner leur procès contre l'Etat russe.
Le Centre prépare également pour Strasbourg le dossier de l'ancien pdg du groupe pétrolier Ioukos, Mikhaïl Khodorkovski, condamné en mai 2005 à neuf ans de prison après un procès largement considéré comme politique.
Près de 200 dossiers sont en attente au CAPI d'être envoyés à Strasbourg, une cinquantaine y sont déjà, sans oublier "quelque 15.000 demandes d'aide juridiques que nous avons reçues", a précisé l'avocate Karina Moskalenko.
La Commission internationale des Juristes s'est dite également "inquiète des éventuelles conséquences de cette affaire pour d'autres ONG de défense des droits de l'Homme en Russie" et a appelé "les autorités russes à faire preuve d'une position politiquement neutre" dans cette affaire.
"Si nous incluons nos subventions à la déclaration fiscale, toutes nos ONG tomberont en faillite", a déclaré Lev Ponoparev, de l'ONG Pour les Droits de l'Homme.
Les défenseurs russes des droits de l'Homme craignent des répressions du Kremlin depuis la ratification en janvier par le président Vladimir Poutine d'une loi controversée visant à contrôler le financement des ONG.
AFP via Le Monde.
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Photo: Karinna Moskalenko (khodorkovsky.ru)
Quoi de plus logique en effet que les procédés qui ont si bien marché avec Khodorkovsky soient employés ensuite contre ses avocats? Si certaines ONG ont pu gagner des procès contre le fisc, on peut gager que ce ne sera pas le cas du Centre de Défense Internationale
Le Centre de Défense Internationale est l'ONG russe qui s'est spécialisée dans la représentation des intérêts des citoyens russes devant la Cour Internationale des Droits de l'Homme de Strasbourg. C'est d'ailleurs à ce titre que Karinna Moskalenko a été amenée à se charger du dossier Khodorkovsky. Inutile de dire à quel point cette organisation, qui a plusieurs fois obtenu la condamnation des autorités russes pour violation des droits de l'homme est dans le collimateur du pouvoir...