De passage hier à Paris, le défenseur canadien de l'ancien patron de l'empire pétrolier russe Ioukos, aujourd'hui démantelé, a rencontré la presse. Khodorkovski purge huit ans de prison en Sibérie.par Véronique SOULE
Pensez-vous encore obtenir sa libération ? Il s'agit d'abord d'assurer sa survie. Il a beaucoup maigri, ses cheveux sont tout blancs. En prison, sa vie est en danger. Le goulag n'a pas changé depuis l'effondrement de l'URSS. Il y a quinze jours, il a ainsi été victime d'une étrange agression. Il s'est réveillé un matin le visage plein de sang. Il a dû avoir cinq points de suture près de l'oeil. Son agresseur était un autre détenu, un déséquilibré du nom de Koutchma. Mais il n'a pas porté plainte, car cela lui aurait porté préjudice à l'intérieur de la prison. Ceci dit, nous visons toujours sa libération. Son procès a été illégal, le Conseil de l'Europe lui-même l'a souligné.
Que pensez-vous de l'attitude de la communauté internationale ?La France observe un silence retentissant. Quand Dominique de Villepin est venu récemment à Moscou, il a lu ses poèmes, les larmes aux yeux. Patrie des droits de l'homme, Paris regarde sans broncher les violations en Russie, l'attaque contre les médias indépendants, puis l'arrestation de Khodorkovski qui a été un tournant, le virage avant l'autoritarisme. La Russie a alors changé sa politique étrangère et a commencé à utiliser l'arme énergétique. Khodorkovski est devenu le premier «otage de l'énergie». La communauté internationale doit réagir face au chantage de Poutine. Au moment où la compagnie russe Rosneft, qui s'est approprié les actifs de Ioukos, s'apprête à entrer en bourse, elle doit demander d'où viennent ses biens. Mais les Russes exportent la peur, les Occidentaux craignent ensuite d'être interdits de travailler dans le pays. Alors que la Russie préside le G8, l'UE doit l'appeler à respecter l'Etat de droit. Sinon ce sont les valeurs européennes qui vont sombrer.