16.12.04
WASHINGTON, 16 décembre-de notre correspondant Arkadi Orlov. Un juriste américain ayant requis l'anonymat et qui avait assisté mercredi à l'audience du tribunal de Houston où la demande de Ioukos était examinée sous la présidence de la juge Leticia Clark, a annoncé à RIA Novosti que Hugh Ray, le célèbre avocat de Houston défendant les intérêts de la Deutsche Bank, avait officiellement fait appel à la demande de mise en faillite déposée par Ioukos auprès du tribunal.
Selon le juriste, Hugh Ray a motivé son appel par le fait que la Deutsche Bank a déjà entamé la procédure d'octroi d'un prêt à Gazprom pour pouvoir participer à la vente aux enchères de Iouganskneftegaz et que pour cette raison la suspension des enchères serait préjudiciable à la banque.
Par ailleurs, Hugh Ray a qualifié le demande de mise en faillite déposée par Ioukos auprès d'un tribunal américain de "geste juridique de désespoir" de la part de la compagnie.
Aucun représentant de la Russie n'était présent à l'audience du tribunal et pour cette raison l'avocat de la Deutsche Bank a été la seule partie à s'opposer à la demande de Ioukos, a indiqué le juriste. Selon celui-ci, les représentants de Ioukos présents ont informé la juge Leticia Clark que les pièces concernant la faillite de la compagnie avaient été remises mardi au gouvernement russe à Moscou, à l'ambassade de Russie à Washington, au consulat général de Russie à Houston ainsi qu'à l'avocat américain représentant les intérêts du gouvernement russe aux Etats-Unis.
En dépit de l'appel de l'avocat de la Deutsche bank, la juge Leticia Clark a décidé d'entreprendre jeudi matin, 16 décembre, l'examen de la demande de "suspension" de toutes les opérations sur les actifs de Ioukos, y compris la vente aux enchères de Iouganskneftegaz fixée pour dimanche, a annoncé l'interlocuteur de RIA Novosti.
Selon lui, jeudi les avocats de Ioukos devront présenter à la juge Leticia Clark des preuves concernant quatre points, confirmant notamment la déclaration de Ioukos selon laquelle Iouganskneftegaz pourrait être vendu pour le prix de 8,6 milliards de dollars alors qu'en réalité cette compagnie en vaut au bas mot deux fois plus.
D'autre part, il faudra aussi que les avocats prouvent que la somme de plusieurs millions de dollars destinée à payer leurs honoraires et déposée dans des banques de Houston appartient bien à Ioukos. La juge s'est également intéressée à la question de savoir pourquoi la vente aux enchères de Iouganskneftegaz avait été fixée au dimanche, 19 décembre, qui est un jour férié et dans quelle mesure cette pratique est typique pour la Russie, a déclaré le juriste.
Pour ce dernier, si la juge Leticia Clark fait droit à la demande de Ioukos, la prescription concernant la "suspension" de toutes les opérations sur les actifs de la compagnie russe aura effet pendant quinze jours, après quoi l'examen de la faillite reprendra son cours.
Si la "suspension" est décidée, alors les prêts octroyés par les banques étrangères pour acquérir Iouganskneftegaz seront déclarés irréguliers par le tribunal américain si bien que les actifs de ces établissements financiers aux Etats-Unis pourraient être gelés. Cette seule menace pourrait suffire à arrêter la vente de Iouganskneftegaz, a dit le juriste en ajoutant que la Deutsche Bank, la BNP Paribas, la Calyon et d'autres banques, sans déjà parler de la banque américaine J.P.Morgan, ont évidemment des actifs en territoire américain et c'est précisément sur cette "hantise" de sanctions juridiques que misent les auteurs de la demande de Ioukos.
Mercredi, au cours des premières auditions, pour démontrer que le tribunal de Houston était habilité à examiner l'affaire de la compagnie russe, les représentants de Ioukos avaient prouvé à la juge Leticia Clark que Ioukos et ses dirigeants déployaient une activité au Texas, que Ioukos avait des actifs dans des banques de Houston et que cela aussi justifiait un tel examen.
Ainsi, Ioukos a placé dans la banque Wells Fargo cinq millions de dollars pour payer les honoraires des avocats locaux, deux autres millions avaient auparavant été versés à un autre bureau d'avocats texan qui s'était occupé d'autres affaires de Ioukos aux Etats-Unis. En outre, pour que le directeur financier de Ioukos, Bruce Misamor, résidant à Houston, puisse assumer ses fonctions et couvrir les dépenses afférentes à l'examen de la demande de faillite par le tribunal, environ 500.000 dollars supplémentaires ont été déposés à la filiale de Houston de la Southwest Bank of Texas.
Selon une copie de la demande officielle de mise en faillite de Ioukos, la décision de saisir le tribunal des faillites du district sud de Houston a été prise par le directoire de la société "Ioukos-Moscou" réuni le 10 décembre à Moscou.
( Novosti, 16.12.2004)
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