30.11.04
Le président russe Vladimir Poutine a dit mardi vouloir poursuivre avec l'aide de la justice sa lutte contre toute influence sur le pouvoir des "oligarques", ces hommes d'affaires au premier rang desquels l'ex-pdg du pétrolier Ioukos, Mikhaïl Khodorkovski, emprisonné dans une affaire considérée comme inspirée du Kremlin.
"Nous nous battons contre (l'influence des oligarques sur le pouvoir), et allons continuer à nous battre. Et notre mission, avec vous, est d'empêcher, par des moyens démocratiques et légaux, une telle voie pour le développement de la Russie", a dit le président russe, ouvrant le 6e Congrès des Juges russes qui se déroulait mardi au Kremlin.
"Nous entreprendrons pour cela tout ce qui est en notre pouvoir et nous allons agir ensemble à l'avenir avec le système juridique dans cette direction", a-t-il encore dit, sous les applaudissements de la large assemblée de juges rassemblés dans l'immense salle qui accueillait autrefois le Soviet suprême (parlement soviétique).
Répondant à la déclaration d'un juge selon lequel le pouvoir en Russie dépend de "groupes oligarchiques l'utilisant pour leurs propres intérêts", le président Poutine a déclaré que cette situation persistait "encore en partie" en Russie.
L'ex-pdg de Ioukos, en prison depuis plus d'un an et inculpé de fraude fiscale et d'escroquerie à grande échelle, risque plus de 20 ans de prison au terme d'une affaire motivée selon les analystes par des enjeux tant politiques qu'économiques, autour du premier groupe pétrolier russe.
Celui-ci, acculé à la faillite par une avalanche de redressements fiscaux se chiffrant en milliards de dollars, est voué au démembrement.
La filiale pétrolière du géant gazier Gazprom contrôlé par l'Etat a indiqué mardi qu'elle serait candidate au rachat de ses principaux actifs.
Evoquant par ailleurs la réforme en cours du système judiciaire, M. Poutine a insisté sur le fait qu'il restait "encore beaucoup de problèmes", notamment celui de la corruption des juges.
"La réforme de la justice doit se poursuivre", a-t-il dit, annonçant le dépôt le même jour de plusieurs projets de loi à la Douma (chambre basse du Parlement).
La perspective de nouvelles réformes judiciaires, et l'inquiétude qu'elles suscitent, étaient évoquées mardi par la presse russe.
"L'intrigue principale est de savoir si la justice fera partie de la +verticale du pouvoir+ (pouvoir central fort défendu par M. Poutine) ou bien si on reconnaîtra la primauté de la loi sur la volonté des dirigeants", s'interrogeait même le journal officiel Rossiskaïa Gazeta, évoquant la possible nomination directe par le président de certains responsables judiciaires.
Le président Poutine, très applaudi lors de ce Congrès, a insisté sur "l'indépendance de la justice" et de "la séparation des pouvoirs".
Veniamine Iakovlev, président de la Cour d'arbitrage, a comparé le président Poutine à "ce grand réformateur, Alexandre II", tsar russe qui lança en 1864 une importante réforme administrative et judiciaire.
Le président de la Cour Constitutionnelle, Valeri Zorkine, a lui aussi fait référence à Alexandre II et vanté "un pouvoir fort sans lequel la Russie s'effondre".
(Dépèche AFP lue sur Voila.fr, le 30.11.2004)
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Commentaire :
Evidemment, on n'ose pas espérer, que par "oligarques" le président sous-entende ses bons amis Setchine et Miller. Dans ce cas, compte-tenu du fait que le premier est le beau-père de la fille du procureur général, la phrase de Poutine sur le lien entre certains groupes oligarchique et la justice pourraient avoir un certain sens. Mais il faut signaler que ces liens jouent essentiellement contre Ioukos et son ex-président, dont le procès se déroule avec de nombreuses infractions à la législation dont personne en Russie ne semble se soucier...
Derniers développements
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L'arrestation du PDG de la compagnie pétrolière russe
YUKOS Mikhail Khodorkovsky marque un tournant important dans l'histoire
de la Russie contemporaine. Incarcéré le 25 octobre 2003,
il a été condamné à l'issue d'un
procès inquisitorial à huit ans de camp de travail.
M. Khodorkovsky durant son procès
Son directeur financier, Platon Lebedev, a reçu la même peine.
La dureté de ce traitement, disproportionnée par rapport aux faits qui leur sont
reprochés, laisse supposer des motifs politiques dans l'affaire
YUKOS : Mikhail Khodorkovsky est en effet connu pour ses convictions
libérales et pour le soutien financier qu'il a apporté
aux partis d'opposition lors des dernières élections. Parallèlement, la
compagnie YUKOS dont il était également le principal
actionnaire a été soumise à des redressements
fiscaux successifs toujours plus exorbitants, qui ont servi de
prétexte à confiscation de la plupart des actifs de
la société. Pour tenter de pallier un
certain déficit d'information en langue française, je me
propose de donner - dans la mesure de mon temps disponible - une
couverture au jour le jour de ce qui est perçu en Russie comme
"le procès du siècle".
L'Observatrice
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